Traversée de l'Atlantique - jour après jour

03/12/2010 03:06

 

Jour 2

 

On a dû faire un bon 180 Miles aujourd'hui beaucoup plus en direction du Sud que prévu. Si ça continue comme cela on va finir par passer par le Brésil avant d'atterrir en Martinique. Remarque on a longtemps hésité à y aller...

 

La navigation ne fut pas très agréable avec des vagues venant sur le travers par bâbord et nous chahutant continuellement. Cela a mis l'équipage un peu patraque. Céline a passé la journée au lit avec envie de vomir et mal au ventre.

 

Mais nous avons eu la joie de faire une belle pêche. Un beau barracuda ou quelque chose d'approchant. On a eu du mal à l'identifier clairement avec nos livres sur les poissons. 1m30 et le poids approximatif d'un jerricane de Gasoil de 20L. Quoi vous ne connaissiez pas cette nouvelle unité de poids ? C'est que le marin est plein d'imaginations quand il est pris en défaut... Quoiqu'il en soit, à peine la bête fut-elle mesurée, prise en photo que notre usine à débiter le poisson s'est mise en marche. Eh oui, nous avons une usine à débiter le poisson sur le bateau. Elle a forme humaine, tient la conversation d'un homme et s'occupe même des enfants. Mais dès qu'un poisson est pêché, en quelques instants, une métamorphose interne s'opère chez l'"homme" et en dix minutes ce qui était une magnifique création de la nature est transformée en filet de poisson... 

Méfiez vous des papis pécheurs...

 

Cette nuit la mer est plus agréable et nous prenons de petites vagues presque de l'arrière. Nous sommes toujours avec le Genaker et un ris dans la grand voile. Avec 16 à 20 noeuds de vent à 145° nous faisons quelques pointes à 13 noeuds de vitesse. Pas mal je dis.... Et sympa.

 

Jean-Franck

 

Jour 3

 

Journée de galère aujourd'hui. J'ai même pas envie de calculer la distance parcourue.

Il a fait chaud, presque pas de vent. Ce n'est pas ce qui était prévu.

Remarque qu'il n'avait pas été prévu qu'on vire de bord vers l'Ouest. Mais j'ai senti comme une angoisse dans l'équipage. L'angoisse de ne toujours pas prendre de cap direct sur les Antilles. Alors pour rassurer tout le monde sur ma santé mentale on a fait cap au 300°. Oui, oui, je sais bien que ce n'est pas un cap direct non plus, mais psychologiquement c'est très bon. On est presque dans la bonne direction et en plus on se rapproche de la maison, située au nord de notre position. Un très beau coup double je vous assure...

 

Ce ne fut pas une bonne idée. Nous sommes restés toute la journée avec 7 nœuds de vent presque arrière et avons fait 4 heures de moteur.

Finalement, énervé par ce mauvais choix j'ai décidé de remettre un peu cap au Sud vers le 12ème et miracle nous avons trouvé un peu de vent d'Est, Sud-est soufflant à 10 Nœuds. Assez en tous les cas pour nous donner un peu de vitesse et surtout de l'air sur le bateau.

 

Cependant nous avons un petit stress avec Maude. Sa petite diarrhée n'a toujours pas disparu depuis quelques jours et cela inquiète Céline car on est à cours de Diargal (Lait sans lactose pour les non initiés).

Céline a donc écrit un courriel à un docteur afin de lui demander conseil. Il va sans dire que cette inquiétude, plus le bateau qui n'avance pas, plus l'atmosphère un peu lourde...Tout cela mine un peu le moral.

 

Mais bon, demain sera un autre jour...Avec du vent j'espère.

 

Il y a quand même un truc dingue, c'est qu'on est à plus de 300 Mn de la terre la plus proche, en l'occurrence le Cap Vert, et qu'on a récupéré sur le bateau deux criquets et une libellule. Ça m'interpelle moi.

 

Jean-Franck

 

 

Jour 4

 

Aujourd'hui on a fait plein Ouest presque tout le temps filant 6 à 9 Nœuds. La mer était calme et donc la navigation agréable.

Bien sûr on aimerait bien toucher un peu plus de vent pour nous stabiliser une vitesse de 10 nœuds mais comme le dit Francis (père de Céline) on pourrait aussi toucher un peu moins de vent. Je me demande s'il a pas été moine bouddhiste dans une autre vie...

D'ailleurs c'est ce qui est en train de se passer cette nuit !!!

 

Cet après midi, fut marqué par la rencontre avec une belle troupe de marsouins. Ils étaient d'humeur joueuse et pendant que certains jouaient à se poursuivre devant l'étrave du bateau, d'autres nous ont gratifiés de quelques jolis sauts hors de l'eau. Ce fut le ravissement des enfants pendant quelque temps. Quand je pense qu'il y a des gens qui vont payer des billets dans des parcs aquatiques pour voir ça alors que c'est si simple de l'avoir gratuitement avec des animaux en liberté...

 

Tiens lors de mes phases d'intense activité cérébrale, qui a ricané ? Je disais donc que lors d'une de ces phases, je crois qu'on appelle cela le sommeil paradoxal...Euh peut-être pas, ou alors il s'agit des périodes d'extra lucidité ? Bon bref, j'ai répondu à une question qui me turlupinait: Pourquoi, quand il n'y a pas de courant, la vitesse GPS est-elle toujours strictement inférieure à la vitesse sur l'eau du bateau. La vitesse sur l'eau étant la vitesse relative du bateau par rapport à l'eau sur lequel il se déplace ? Je donnerai la réponse demain.

 

C'est marrant, cela fait quelques jours qu'on navigue tout seul et cette nuit on se retrouve à plusieurs bateaux en visuel. On a même eu un contact radio avec Coridam (le Bavaria 38) qui est à 15Mn (Mn=Mille Nautique et non Minute pour les terriens) de notre position tandis que Christina (un bateau anglais) signalait sa position à un cargo qui passait pas très loin de lui. Tout d'un coup la mer se repeuple d'hommes, retrouvant ainsi un coté convivial qui fait plaisir.

L'instinct grégaire est rassuré. L'homo marinus ira se coucher tranquillement. Il n'est pas seul au monde...

 

Jean-Franck

 

 

Jour 5

 

Aujourd'hui la navigation a été tranquille. Entre 10 à 13 nœuds de vent et navigation direction Ouest.

Vitesse de Céramaje entre 6 et 9 Nœuds.

 

On a retrouvé un bateau nommé Christina que j'avais entendu la nuit dernière appeler un Cargo pour lui demander s'il l'avait bien repérer:

"Allo, Allo, ici Christina, je suis à telle position est-ce que tu m'as bien vu, Gros tas de tôle mal emboutie qui sent le mazout...

Oui, oui, j't'ai bien vu, espèce d'asticot résineux parasite des océans..." Je ne suis pas très sûr de la traduction, vu que c'était de l'Anglais l'un avec un accent so british, et l'autre so indish.

 

On s'est croisé à 300m, juste par le jeu du hasard de nos routes. Il va à Sainte Lucie avec l'ARC et nous en Martinique, il n'y avait objectivement aucune raison de se croiser à cet endroit. Le hasard des trajectoires de navigation, voilà qui devrait énerver plus d'un navigateur qui prépare sa route avec précision. En fait, in finet, tout cela ressemblera à un comportement complètement chaotique. Mais ce qui nous rassure c'est que ce comportement chaotique est le fruit de décision complètement rationnelle, enfin presque.

La vision des Grecs anciens était qu'il faut trouver Sa place dans l'univers et ce pour parvenir à vivre en harmonie avec le Cosmos. Cette conception du monde, à laquelle j'adhère, peut mener à la conclusion qu'un monde harmonieux est aussi un monde statique, pour ainsi dire un monde mort, puisque si chaque chose est à sa place, plus rien ne bouge.

Mais si l'on introduit que l'état naturel du Cosmos est chaotique, alors on peut comprendre que Sa place "harmonique" est en perpétuel mouvement...

J'avais envie de donner un peu mal de tête ce soir.

 

Sinon la deuxième nouvelle du jour c'est l'état de santé de Maude. Pour l'instant ça va. Mais, comme l'a lu Céline, avec les diarrhées cela peut se dégrader très vite.

Une fois qu'on a dit cela on comprend vite qu'elle fait stresser sa mère et m'a donné l'occasion d'utiliser l'Iridium en vocal au milieu (ou presque) de l'Atlantique. Ce n’était pas génial au niveau de la communication...

C'est remarquable comme quoi au milieu de l'Atlantique les choses prennent vite des proportions inquiétantes. Le pire dans tout cela c'est que je suis sûr que si nous n'avions pas de moyen de communication cela stopperait net les échafaudages de plans catastrophes et calmerait naturellement les esprits inquiets maternels. Enfin on va appliquer strictement le régime anti diarrhée (vraiment une drôle d'orthographe ce mot) et on verra dans deux jours...Enfin espérons qu'il n'y aura plus rien à voir.

Et dire que tout ça c'est que des histoires de cacas mous qui redeviennent durs ou pas !!! Comme quoi les fixations des enfants sur le pipi caca à certains moments de leur vie sont pleines de bon sens finalement...

 

Jean-Franck

 

 

Jour 6

 

Ce sera bref et intense.

L'anémomètre vient de tomber en panne. Je crois qu'il n'a plus de batterie. Comme le vent n'arrête pas de varier, le marin de quart doit donc être présent à coté de la barre. En plus on est balloté par de petites vagues très désagréables que l'on prend de travers.

L'utilisation de l'ordinateur en est pénible.

Maude a l'air d'aller mieux. Mais avec les filles on ne sait jamais...

 

Jean-Franck

 

Jour 7

 

Ça y est, on les touche enfin ces alysés. Un bon vent de Nord-est entre 18 et 25 Nœuds qui nous fait presque voler de vagues en vagues avec notre cap au 270.

"Tu es sûr qu'il faudrait pas prendre un ris". Voila la phrase que j'entends depuis que le vent a commencé à se lever et le speedo s'énerver un peu. Merde cela fait plus de quinze jours que j'attends ce moment là, ce serait sympa de me laisser en profiter un peu quand même. Des petits surfs à 14-15 nœuds, sans violence, alors que la mer n'est pas encore vraiment formée, moi je dis que cela se goute avec délectation et silence. Mais le silence et la gente féminine......

 

Ouarf, je n'ai même pas eu le temps de finir ma médisance qu'on s'est fait rattraper par un grain avec plus de 30 Nœuds de vent. Du coup il y a un petit moins de génois, presque plus rien pour dire vrai, et toujours 2 ris dans la GV. Et devinez quoi, j'ai à nouveau entendu la petite voix qui dit:" et si on prenait un ris dans la GV"... Il faut dire que ces montées de vent dans la nuit noire ont un coté un peu stressant. Les voiles claquent violemment quand le vent change de direction et on ne sait plus vraiment d'où viennent les vagues. Bref que du bonheur non ?

 

Hier nous avons eu un contact radio avec un bateau nommé MEDOC, un Océanis 425 qui fait route avec un cata PDQ 36 nommé DILETTO. Les deux étaient situés 10 et 20 Mn au nord de notre position. Les 2 bateaux sont partis 10 heures avant nous de Mindelo et ont dû faire route directe jusqu'ici sans essayer de trouver les Alysés au Sud du Cap Vert. 

10 heures en 7 jours de navigation ce n'est pas trop brillant pour nous. Ceci dit on n’est vraiment pas équipé pour le petit vent arrière. Allez, il faut bien se trouver des excuses.

Si je parle de DILETTO c'est que je crois bien qu'il s'agit du bateau qu'on a dépassé vers 22h00 dans la nuit. On est passé à 100m de lui et je ne sais même pas s'il nous a vus...En tout les cas il n'y eut aucune réponse à la VHF ni aux signaux lumineux.

 

Au fait, premier caca mou de Maude. Pourvu qu'ça dure.

 

Jean-Franck

 

 

Jour 8

 

Bonne navigation Aujourd'hui.

On garde le Cap 280 à 290, légèrement trop Nord par rapport à l'endroit où l'on souhaite aller, mais cela nous permettra de corriger confortablement plus tard si besoin est.

On a eu presque tout le temps plus de 20 Nœuds de vent, Ce qui nous a permis de faire plus de 250 Mn. Les spécialistes apprécieront.

Le seul hic c'est que lorsqu'on dort et qu'on sent le bateau partir au planning (c a d monter à 15 nœuds) je crois qu'on est tous un peu stressés. Une question d'habitude et de confiance au bateau sans doute mais pour l'instant le couple n'est pas là encore. Si bien que la nuit dernière, tout le monde s'est retrouvé debout alors qu'on se faisait rattraper par un petit grain.

Ce soir, j'ai donc décidé pour préserver le sommeil de tout le monde et de lever (relativement dirait Céline) le pied pendant la nuit histoire de laisser faire de beaux rêves à l'équipage.

A propos d'équipage, Raphaël a tenu absolument à ce que je vous raconte que pendant notre repas un poisson volant est arrivé directement dans l'assiette de papi Francis. Ces pauvres poissons volants sont tellement paniqués par l'arrivée du bateau qu'ils en font vraiment n'importe quoi.

Pensez donc, aller se jeter dans une assiette de paupiettes, comme si les paupiettes cela se faisait au poisson...

Volontairement on ne pêche plus depuis 2 jours et notre double pêche d'une daurade coryphène et d'un Barracuda like. De plus je pense qu'on va un peu trop vite. Ou alors on risque de ramener du très gros.

 

Comme on ne compte plus les poissons, on compte les bateaux rattrapés. 2 aujourd'hui. Aucun ne répond aux appels VHF. Encore une confirmation qu'il vaut mieux ne pas avoir de problème au milieu d’une transat...

 

Jean-Franck

 

 

Jour 9

 

Un petit moins que 20 Nds de vent relativement constant venant du 60° (Nord est), cap 280°, 290° toute la journée, et 218 Mn parcourus. Pas mal, on en profite encore pendant que cela dure. Cela devrait commencer à baisser dans 2 jours en se rapprochant de notre destination.

 

Je viens de recevoir un mail d'Hydra (des gens de l'Est qui se sont installés au sud pour leur retraite le tout pour finir direction Ouest sur leur bateau jusqu'à ce qu'ils aient vérifié si la terre était vraiment ronde.

Et si jamais c'était que des conneries tout cela. Si jamais la terre était bien plate comme le pensait nos ancêtres du Moyen Age. D'ailleurs qui parmi nous a vérifié cette affirmation au demeurant très troublante? Bref j'aimerais  bien voir leur tête avec leur picon bière si jamais ils se retrouvent au bord du monde...

Je disais donc que je viens de recevoir un mail nous annonçant leur départ des îles du Cap Vert pour la traversée vers le Marin. Mais il est en train de se jouer un drame à bord. Ils avaient en effet prévu pour fêter Noël en mer une petite saucisse lentilles en conserve. Et voilà que le premier jour de navigation Jean-Claude réclame à Françoise qu'on ouvre la boite histoire de se réconforter un peu. Il faut savoir que l'Alsacien est une personne au moral fragile quand il est loin de chez lui et que ce moral hésitant est fortement influencé par la présence de saucisses à son repas. Si vous agrémentez le repas à base de saucisses d'un peu de lentilles alors vous retrouvez votre alsacien comme s'il n'avait jamais servi avec un moral requinqué...

La prochaine fois que vous croisez un Alsacien un peu désespéré, faites l'essai et vous verrez que je ne blague pas.

Et donc comment elle va faire la Françoise quand à l'arrivée de Noël, son ptit gars d'alsacien il va lui réclamer comme prévu sa ptite saucisse lentille, histoire de lui faire oublier qu'il ne verra pas son marché de Noël cette année? Elle affirme qu'une boîte saucisses haricots blancs fera aussi bien l'affaire...

Méfie-toi Françoise, méfie-toi, moi je dis que cette histoire va mal finir et qu'on risque d'entendre sur RFO qu'un alsacien encombre le canal 16 de la VHF (Canal de veille pour la communication radio en mer) en criant désespérément :"J'veux mes saucisses lentilles, j'veux mes saucisses lentilles".

Le pire de tout cela c'est que tout  barbouillé par la reprise de la nav, il n'a rien mangé le salopard !!!

 

Pour fêter notre mi parcours, Céline nous a fait de très bonnes crêpes avec Raphaël. Il a été question pendant un moment d'apéro mais on est tous un peu barbouillé par le vent, la vitesse, la fatigue.

 

On a eu des nouvelles de Coridam. Ils sont 300Mn derrière nous et quand ils ne ramassent pas les poissons volants sur le pont ils arrivent quand même à naviguer. Josiane a l'air de commencer à trouver le temps long...

Nous je crois qu'on a perdu la notion du temps, même si on sera contents d'arriver aussi.

 

Jran-Franck

 

 

Jour 10

 

Aujourd'hui nous avons eu entre 25 et 30Nd de vent Nord est, une mer agitée d'Est et nous avons presque tout le temps fait route au 280-300. Nous avons navigué avec 2 ris dans la grand voile et tout le génois envoyé. Si in finet ce ne sera que 220Mn pour la journée nous étions partis sur 300Mn à mi journée puis j'ai décidé de calmer un peu le jeu.

 

Ce fut le grand Bal Trap du record de vitesse de Céramaje, avec de longs surfs à 16-17 Nds sur les vagues avec lesquelles nous naviguions presque en parallèle. Les Gagnants sont : Francis avec 20.9 Nds suivi de près par Raphaël avec 19.8 et le troisième est le pilote automatique à 19.5.

Je commençais à me demander l'intérêt d'avoir pris un cata dit de course-croisère car pour l'instant on n'avait vu que le coté spartiate de cette option sans réellement avoir le plaisir des performances. Là on a vu. Et c'est assez remarquable. C'est un peu comme pour ma voiture: A 180 elle ne demande qu'à aller à 250. Il suffit juste d'appuyer. Le tout se fait dans un confort et une sécurité surprenants. Le seul élément perturbateur est le bruit que fait l'eau à l'arrière du bateau. Nous avons droit à un bouillonnement fatiguant à la longue. Tout le reste on y prend goût et en particulier le  bruit si spécial de

l'écoulement de l'eau le long de la coque quand on part au planning...Cela me fait penser au bruit que fait la crème chantilly quand elle sort sous pression. Bizarre non?

 

Evidemment à ces vitesses il n'est pas question de pêche. L'appât en forme de poulpe ressemble à une petite fusée dans l'eau. Remarque que hier un poisson a mordu, sans doute un qui ne suportait pas de voir un poulpe filer à la vitesse de bip bip le road runner. Mais la ligne a cassé et on n'a pas pu voir ce qui était assez fêlé pour morde à cette vitesse là.

 

Jean-Franck

 

 

Jour 11

 

Aujourd'hui on a viré de bord pour faire route au 230° avec 19 Nds de vent d'Est, et une mer relativement calme. 190Mn parcourus mais nav relaxe.

 

Notre route directe serait le 270, le cul au vent, mais un cata sans spy ça n'aime pas ça. Je ne sais pas pourquoi, les odeurs sans doute. Quoique Céramaje ait le cul propre. Il faut dire que la journée d'hier lui a bien nettoyé les dessous de ses jupes. Vu d'en haut c'est comme si on l'avait passé au Karcher. On ira voir cela de plus près à l'arrivée à...

Ben oui on ne sait toujours pas vraiment où atterrir pour l'instant. Je crois qu'on aura envie d'être au calme, de se détendre, et de ne pas avoir de contraintes matérielles. Sans compter que certaines pièces des voiles sont à reprendre. Bref une équation difficile à résoudre.

Alors Le Marin, Pointe à Pitre, Les Saintes...on se décidera au dernier moment sans doute.

Nous sommes passés hier en UTC-3 pour se mettre progressivement au décalage de la Guadeloupe. Et c'est passé comme une lettre à la poste. Il faut dire que sur le bateau les heures et les jours ont perdu tout sens. Il est l'heure de manger, de se coucher, de rendre son quart. Et le rythme naturel c'est le soleil qui nous le donne. Bref on régresse au niveau d'un gallinacé. Le retour vers le monde occidental va être compliqué je pense.

 

Les histoires de caca de Maude ne sont toujours pas finies. Dès qu'on essaie de recommencer à l'alimenter normalement c'est trop mou voir diarrhée. On va donc essayer sans remettre de lait dans son alimentation. Mais la mère re-stresse car on n’a même plus de Tiorfan. Du coup j'ai droit à :"tu es sûr qu'on prend la route la plus rapide avec tes Zig Zag". C'est marrant c'est la même voix que celle qui me disait de réduire la toile et de ralentir... Comme quoi les cacas de Maude ont un espèce de pouvoir magique qui fait changer la vision des femmes assez radicalement et le tout sans cris...

Enfin, demain on fera une expérience grandeur nature pour convaincre l'assemblée que le vent arrière c'est pas bon. Mais peut-être que le caca magique de Maude a une influence aussi sur Céramaje et qu'il se comporte d'une façon atypique lui aussi.

Vu qu'on est dans la magie maintenant je ne présage de rien...

 

Jean-Franck

 

 

Jour 12

 

Aujourd'hui, Vent de 15 à 20 Nds d'Est. Nous avons fait Cap au 230 pratiquement toute la journée naviguant à un pépère 8 à 10 Nœuds. Depuis qu'on est redescendu au Sud, on recommence à croiser des voiliers qui font sans doute route directe sur Ste Lucie ou la Martinique sans passer par les zig zag.

 

Nous, nous avons décidé d'atterrir à St François en Guadeloupe car il parait que c'est le mouillage le plus sympa de la Guadeloupe. Et ça tombe bien parce que nous on aime bien les mouillages sympas. En plus on ne sera pas trop loin de la maison EDF où Marie Thé devrait arriver. Ceci dit, il semble que ce soit compliqué d'arriver la nuit là-bas. Donc si on arrive de nuit on ira ailleurs...Faut pas se prendre la tête avec des idées bien arrêtées aux Antilles.

 

Depuis quelques jours nous avons retrouvé la lune pour nos navigations de nuit. Une nuit relativement claire, avec une voute étoilée sympa elle aussi (décidément c'est la soirée pour les choses sympas) et le tout agrémenté de nombreuses étoiles filantes, sympas elles aussi. Ben ouais moi j'trouve ça sympa une étoile filante. Et j'vois pas pourquoi j'le dirais pas sous prétexte que j'ai déjà employé le mot sympa plusieurs fois précédemment. C'est pas parce que ce sont les petites dernières, qu'elles ont une vie furtive, qu'elle n'ont pas droit à leur petit sympa elles aussi. Non mais...

Bref nous avons tiré notre dernier bord, du moins on l'espère en direction de la Guadeloupe pour une arrivée dans 2 jours et 14h.

 

Jean-Franck

 

 

Jour 13

 

Aujourd'hui on a eu entre 10 et 15 Nœuds de vent toute la journée venant Est Nord-est, et cette nuit le vent passe franchement au Nord-est entre 15 et 18 Nœuds. Nous avons fait route au 290 puis au 280 pour essayer de rejoindre en route directe St François ou les Saintes.

On a croisé un cata puis un Monocoque. C'est Marrant parce qu'alors qu'on se rapprochait du Cata, je crois bien que c'était un beau Salina flambant neuf de chez Fontaine Pajot, celui ci a décidé de changer de bord....

1 heure passe...

Saloperie de Genaker (voile d'avant légère qui remplace le génois par petit temps). On l'avait laissé à poste pour la nuit après l'avoir enroulé sur son emmagasineur et il s'est un peu déroulé d'une manière désordonnée. J'ai dû le descendre pendant mon quart et le rentrer dans son sac. Du coup le petit moment sympa que j'avais décidé de passer à jouir de cette probable dernière nuit de transat, avec un petit verre de rhum, un cigare, le tout en contemplant la lune et les étoiles s'est transformé en petite galère. Bon, après la manœuvre, j'ai quand même pris mon verre de vieux rhum, mon cigare, et contemplé les étoiles mais la lune s'était couchée. Petite déception malgré les nombreuses étoiles filantes présentes au rendez-vous...

 

J'en étais donc au Cata qui change de route. Je crois bien qu'il n'a pas supporté de se faire gratter aussi vite par un autre bateau. Ou alors il n'a pas bien analysé ses fichiers GRIB...

Un peu plus tard on a rattrapé un monocoque sous spy. C'était un Anglais qui faisait l'ARC. Il était parti de Las Palmas aux Canaries le 21 novembre et allait en direction de Ste Lucie. Il aura mis plus de trois semaines pour faire sa transat. Mais lui au moins n'aura pas fait un stop au Cap Vert comme certains autres bateaux de l'Arc qu'on a rencontrés là bas remplissant les jerricans de mazout pour continuer la traversée.

 

Une sorte de sérénité est en train de s'installer sur le bateau. On va bientôt l'avoir fait. Et mine de rien, c'est quand même pas rien. Si on se souvient de l'appréhension qu'on avait sur le projet, sa réalisation commence à porter ses fruits en transformant subtilement, imperceptiblement, mais très certainement la mentalité du groupe d'équipiers.

 

On ne sait toujours pas si Maude nous fera un caca dur avant l'arrivée en Guadeloupe. C'est mou mais pas dur encore. Le suspens reste intact...

 

Jean-Franck

 

 

Jour 14

 

Ce matin en  me levant, je m'aperçois que JF n'a rien écrit sur son journal. Alors, c'est moi qui prends le relai pour écrire un mot aujourd'hui.

Ça y est nous la voyons cette Terre. Nous l'avons découverte au lever du soleil, se dessinant à peine sur la mer. Notre GPS nous prévoit une arrivée dans 5 heures à Saint François. Nous aurions préféré terminer cette traversée à la voile avec un bon vent, mais depuis hier, nous nous trainons, avec 6 nœuds de vent voire zéro... Alors tant pis il faut bien arriver, c'est donc au moteur que nous faisons notre entrée.

Depuis hier nous entendons parler en Français sur le canal 16 de notre VHF. Cela paraît tout bête, mais d'entendre ne serait-ce qu'une voix à la radio, nous a réjouis, et nous a fait prendre conscience à quel point notre arrivée était proche.

Nous avons encore pêché une sorte de barracuda de 90 cm et comme d'habitude, avec l'efficacité de papa, en l'espace de quelques minutes, le poisson était suspendu la tête en bas, pris en photos, découpé en filets, mis dans des sachets de congélation, le tout avec un cockpit astiqué de toute part... Bref comme le dit JF, une vraie machine à débiter ce Francis !!!

Qu'est-ce que nous allons faire en arrivant ? On ne le sait pas trop. Certains ont envie de faire un plouf dans la belle bleue devant un joli mouillage, d'autres ont envie de marcher et de courir à terre, d'autres encore préfèreront rester encore un moment sur le bateau à se rappeler ce que l'on vient de vivre, à réaliser que nous avons bel et bien traversé l'Océan Atlantique... Même si ce n'est pas grand chose en soi, avec les moyens modernes actuels, c'est une expérience qui restera à jamais gravée dans nos mémoires...

 

Céline

 

 

 

 

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